LA PANDÉMIE A OUVERT UNE BRÈCHE DANS NOTRE FAÇON DE RÉFLÉCHIR

La question de la post-vérité n’épuise pas la définition de l’Oxford English Dictionary : « Les faits objectifs ont moins d’influence, dans la formation de l’opinion publique, que les appels aux émotions et aux croyances personnelles ». Les « faits objectifs » impliquent la possibilité qu’ils soient enregistrés et quantifiés. Or, aujourd’hui, nous voyons que la possibilité de quantifier, en temps réel, des choses comme l’approbation ou non d’un grand nombre de personnes concernant une affirmation ou un fait transforme cette « émotion quantifiée » en quelque chose de « réel » en termes d’« image publique » et de « votes » pour ou contre ce qui est approuvé ou non. En même temps, la vitesse avec laquelle le Covid-19 se diffuse fait que l’on en mesure les données « objectives » – le nombre de personnes infectées avérées, le nombre probable selon divers modèles et ainsi de suite – devient un problème très complexe. Cependant, la véritable menace du virus rend aux données scientifiques, aussi complexes et hypothétiques soient-elles, leur valeur vis-à-vis les « opinions ».

En substance, nous constatons que, même si la virulence des fausses nouvelles au cours des dernières années nous a déjà fait remarquer que « la réalité cédait », la virulence meurtrière du Covid-19 nous oblige à « renoncer à la post-vérité aussi ». Si auparavant la soi-disant réalité « objective » cédait sous l’impact des fausses nouvelles, maintenant tout cède : la réalité de la vie à cause de la maladie et de la mort ; les nouvelles « scientifiques », parce que nous n’arrivons pas à les mesurer et les objectiver ; et les fausses nouvelles, car leur effet ne dure pas longtemps, tant que l’on n’aura pas trouvé un moyen pour neutraliser le virus[1].

La « distanciation sociale » qui nous a été imposée semble devoir durer. Il ne s’agit pas seulement d’une brèche qui s’ouvre et nous éloigne physiquement les uns des autres mais d’une crevasse qui nous sépare de tout. Elle nous fait faire un pas en arrière et repenser de façon critique tout ce que nous avons créé, ce que nous faisons et disons.

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Diego Fares SJ

Auteur à La Civilta Cattolica.

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