Le philosophe Michel Foucault qualifie la parrhésie de « franchise, ouverture de cœur, ouverture de parole, ouverture de langage, liberté de parole[1] ». Il ne s’agit pas cependant de dire ce que l’on veut sous la forme que l’on veut, car la parrhésie est de nature une attitude éthique, dans la mesure où ce que l’on a à dire, on le dit « parce que c’est nécessaire, parce que c’est utile, parce que c’est vrai[2] ». La parrhésie est donc liée à la vérité et au bien, et cela exclut la diffamation, la désinformation, tandis que la satire est admise[3].
La « parrhésie » dans le monde gréco-romain
Les Latins ont principalement traduit ce terme par libertas, mais aussi par licentia (au sens étymologique de « faculté ») et, en latin chrétien, par constantia, fiducia, perdant ainsi une partie de la signification originelle, liée essentiellement à la parole[4]. La « franchise » dans la manière de parler se différencie aussi bien de l’adulation, typique des opportunistes, que de la rhétorique vide qui accompagne l’adulation[5].
Aucun discours ne peut cependant faire abstraction de la rhétorique, entendue comme « art de dire ». Bien parler, de manière appropriée et efficace, n’est pas un défaut, mais au contraire une qualité. Le parler libre et franc suppose cependant l’existence d’un risque, surtout si celui qui parle doit le faire devant des puissants ou en affrontant l’opinion publique ; et c’est pour éviter ce risque que beaucoup de gens préfèrent se taire, ou bien ont recours à l’adulation.
La franchise dans le discours — parler en disant la vérité, une vertu aujourd’hui comme alors plutôt rare — fut l’une des caractéristiques des philosophes cyniques et stoïciens : « La parrhésie était l’un des objectifs des philosophes du 1er siècle, c’est-à-dire le discours audacieux, courageux et franc », et cela y compris devant l’empereur, « quelles qu’en soient les conséquences. […] Plusieurs philosophes célèbres de la fin du 1er siècle, particulièrement sous Néron et sous la dynastie des Flaviens, durent affronter la mort ou l’exil à cause de leurs interminables discours moralistes[6]. »
Donc, bien que la liberté d’expression soit alors quelque chose de sérieux, exercée au péril de sa vie, certaines personnes ne se résignaient pas à une existence de « courtisans ». Les chrétiens en faisaient aussi partie.
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