MARIE MADELEINE ET LA RÉSURRECTION
Last Updated Date : 19 octobre 2022
Published Date:4 janvier 2021

Marie de Magdala est une figure clef du premier christianisme. Présente dans les quatre évangiles, elle assume une position unique en étant témoin privilégié de la résurrection. L’Orient aime même l’appeler l’Apôtre des Apôtres. La tradition en a très vite fait, surtout après le 4ème siècle, une pécheresse et une prostituée, en l’identifiant à des femmes anonymes des évangiles comme la pécheresse pardonnée de Lc 7,36-50. Mais rien dans les évangiles n’autorise cette identification.

Que savons-nous donc d’elle ? Peu de choses en vérité ! Elle était de Magdala, un village sur la rive du lac de Tibériade. Et, en second lieu, une information étonnante nous est donnée par Luc lorsqu’il donne la liste des femmes qui suivent Jésus depuis la Galilée (Lc 8,1-3). Il la présente au sein d’un groupe qui est en proximité avec les Douze : « Les Douze l’accompagnaient, ainsi que des femmes qui avaient été guéries de maladies et d’esprits mauvais : Marie, appelée Madeleine, de laquelle étaient sortis sept démons, Jeanne, femme de Kouza, intendant d’Hérode, Suzanne, et beaucoup d’autres, qui les servaient en prenant sur leurs ressources » (Lc 8,1b-3). Cette donnée se retrouve en Mc 16,9 avec une variation sur le verbe employé mais l’immense majorité des exégètes considèrent que l’auteur anonyme de la finale canonique (dite ‘longue’) de Marc reprend ici le texte lucanien. Marie était donc de Magdala et probablement aisée (et donc indépendante).

Selon Luc, Marie avait donc été exorcisée par Jésus. Mais pourquoi « sept démons » ? Le bon sens, tout autant que la valeur des nombres dans la tradition biblique, nous font penser que sa possession était d’une intensité exceptionnelle et dramatique. Nous ne connaissons de l’époque que le Testament de Ruben, un écrit intertestamentaire, à mentionner ‘sept esprits’ : « Ecoutez, mes enfants, ce que j’ai vu quant aux sept esprits d’égarement dans ma repentance ; sept esprits ont été distribué à l’homme, ce sont les responsables des méfaits de la jeunesse » (Test. Rub. 2,1)[1]. Ce qui est sûr, c’est que la mention des sept esprits n’est pas un lieu commun couramment employé à l’époque. Or il se trouve que Luc nous raconte peu après, et dans le cadre d’une polémique sur ses exorcismes, une parabole de Jésus qui évoque « sept mauvais esprits » (Lc 11,26). Pouvons-nous faire le lien puisqu’il s’agit des seules mentions de sept esprits ou démons de tout l’évangile ? De nombreux auteurs l’ont fait de façon rapide. C’est ainsi qu’un des principaux commentateurs de Luc, François Bovon écrit : « la possession par sept démons est, pour Jésus comme en général pour les juifs de son temps, une possession particulièrement grave (la conclusion non authentique de l’évangile de Marc, Mc 16,9, doit dépendre de ce souvenir) »[2]. Beaucoup mentionnent ce parallèle en note mais sans aller plus loin.

This article is reserved for paid subscribers. Please subscribe to continue reading this article
Subscribe