L’IRLANDE ENTRE PASSÉ ET FUTUR
Last Updated Date : 14 octobre 2022
Published Date:24 novembre 2018

L’Irlande est restée pour une bonne part exclue de la « modernité ». Pendant le « long xixe siècle », tandis que dans le reste de l’Europe se répandaient l’industrialisation, l’urbanisation et la sécularisation, et que l’on rejetait les préceptes de la tradition, l’Irlande – et en particulier l’Irlande catholique – avait autre chose à faire. Alors que quelques pays traditionnellement catholiques commençaient à mettre en doute la prééminence de l’Église, les catholiques irlandais devenaient plus actifs et plus fidèles. Les causes en étaient des raisons historiques particulières.

Les premiers siècles après saint Patrick – qui a vécu entre 385 et 461 –, le christianisme s’est développé en Irlande selon des lignes de force typiquement irlandaises. Il a assimilé de manière très efficace les traditions et les fêtes celtiques. La vie de l’Église se structurait autour des monastères et des abbayes, plutôt que des diocèses. Sur différentes questions, qui vont de la date de Pâques à la tonsure monastique, l’Église irlandaise établit ses propres critères, alors que parallèlement elle créait une tradition monastique fortement ascétique. Les saints – hommes et femmes – de cette époque ont valu à l’Irlande l’appellation de « terre de saints et de savants ». En l’espace d’un siècle, une forte impulsion spirituelle a porté le projet missionnaire de saint Colomban et d’autres en Europe continentale.

Malgré cela, le temps passant et peut-être aussi sous la pression des Vikings, on en vint à une décadence et à une indiscipline dans l’Église irlandaise. Un mouvement de réforme, commencé avec le synode de Cashel en 1101, vit cette Église se réorganiser en circonscriptions diocésaines, établissant des frontières qui sont restées en grande partie intactes jusqu’à nos jours. Ce mouvement, suscité par l’arrivée des envahisseurs anglo-normands du xiie siècle, conduisit l’Irlande à s’aligner au plus près des traditions et de la praxis de l’Église romaine. Les Normands, qui partageaient la même identité catholique que les indigènes irlandais, s’intégrèrent au cours du temps dans la société irlandaise et devinrent, comme le veut l’expression, Hiberniores Hibernis ipsis (« plus irlandais que les Irlandais eux-mêmes »).

 

Un XVIIe siècle crucial

L’important effort de colonisation de l’Irlande survint au début du xviie siècle, lorsque les Anglais voulurent consolider leur pouvoir sur l’île, après avoir infligé la défaite à l’armée gaélique à la bataille de Kinsale en 1601. Le monarque anglais était devenu officiellement le chef de l’Église d’Irlande, en plus de celle de l’Angleterre, et les Anglais firent des pieds et des mains pour que les Irlandais se conforment à cette nouvelle réalité.

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