LES DEUX PAPES
Last Updated Date : 5 février 2021
Published Date:28 mai 2020

Un film (Netflix) de Fernando Meirelles avec Anthony Hopkins et Jonathan Pryce, Juan Minujín.

Devenu célèbre avec le film La Cité de Dieu en 2002, le réalisateur brésilien Fernando Meirelles aime transposer au cinéma les œuvres littéraires, cet exercice ô combien périlleux. C’est ce qu’il fait en adaptant, avec l’aide de l’auteur lui-même, sa pièce de 2017, intitulée ‘The Pope’. Il s’agit d’une fiction, assumée comme telle, qui s’appuie sur des hommes connus : les deux derniers papes de l’Église catholique. Mais plutôt que de faire un film facile sur les scandales et les jeux d’influence, le réalisateur et son scénariste, Anthony McCarten, ont voulu raconter le destin de deux hommes de foi face à une décision difficile.

 

Tout part d’une idée simple : le cardinal Bergoglio songe à prendre sa retraite : il aimerait se retirer et redevenir prêtre de paroisse. Il vient à Rome pour plaider sa demande. Au même moment, Benoit XVI, qui avait élu pape au conclave précédent, médite sur une décision majeure et inédite : se démettre de sa charge d’évêque de Rome et se retirer également. Et voilà que Jorge Bergoglio et Joseph Ratzinger se rencontrent et commencent à discuter. C’est volontairement que les noms de famille s’imposent ici car c’est d’abord de la rencontre de deux hommes de chair et d’os que le scénariste entend nous parler. Mais le film échappe aux pièges subtils du théâtre filmé en incorporant de longues séquences argentines tirées de la vie antérieure de Jorge Mario Bergoglio.

Celles-ci, tournées dans un noir et blanc esthétiquement très convaincant, donnent au film un dynamisme que les conversations vaticanes ne pouvaient assurer à elles seules. Ces flashbacks portant exclusivement sur l’Argentine font indubitablement de lui le personnage principal, même si la formidable composition de Anthony Hopkins rend Benoit XVI également très présent. Il faut noter aussi la belle musique du film, composée par Bryce Dessner qui avait déjà travaillé sur The Revenant (2015) et pour lequel il fut nominé aux Oscars.

Les films qui portent sur les papes, présents comme passés, courent toujours le risque de se fixer sur la pompe des institutions et de négliger l’humanité. Il n’en est rien ici. Non pas que Castel Gandolfo ne soit merveilleusement filmé, tout comme la chapelle Sixtine d’ailleurs. Mais parce que c’est d’autres choses que le scénariste et le réalisateur veulent nous parler. Qu’est-ce qu’une décision spirituelle ? Comment peut-on engager sa vie sur un signe ? Comment vieillir en portant le poids de ses décisions passées tout en s’ouvrant au futur et à ce qui vient ? Quelle place la prière peut-elle jouer dans une décision, et au fond dans une vie d’homme appelé à décider et à gouverner ? Car il s’agit bien de la rencontre de deux hommes de foi que traite le film. Leurs récits de vocation, leurs parcours de jeune prêtre et leurs profils intellectuels sont profondément différents. Pourtant tous deux s’estiment et croient dans le rôle de la papauté dans l’Église tout comme dans la force tant de la prière que la confession.

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