Les « nouveaux talibans »
Les dernières mesures prises par le gouvernement taliban à Kaboul, concernant en particulier les femmes, telles que l’accès à l’éducation, le droit au travail et la relance du code de conduite « charaïtique », ont mis en évidence (en cas de besoin) le caractère répressif et substantiellement « misogyne » du nouvel « émirat », bien que justifié par le recours aux traditions tribales et religieuses. Et ce, alors que le pays s’enfonce dans une crise économique et sociale sans précédent, qui en fait l’un des pays les plus pauvres du monde[1]. Pourtant, lors de la première conférence de presse des dirigeants talibans aujourd’hui au pouvoir, ils avaient rassuré les chancelleries occidentales (inquiètes de ce qui se passait) que les femmes seraient « très actives » dans la nouvelle société afghane et que leurs droits seraient garantis. Ce qui n’a pas été explicité à cette occasion, c’est que cette reconnaissance serait mise en œuvre selon les préceptes de la charia, qui devait constituer la base du nouveau système juridique.
Mais qui sont ces « nouveaux talibans » qui ont pris le pouvoir à Kaboul ? Selon le chercheur Domenico Quirico, il y a une différence entre les anciens militants, mobilisés par le mollah Omar à la fin des années 1990, et les actuels. Les premiers ont été recrutés parmi les étudiants des madrasas, des écoles coraniques, et parmi les paysans de la « ceinture tribale pachtoune », enrôlés et armés par les services secrets pakistanais, afin de contrôler son État tribal voisin par le biais du mouvement islamiste qui, contrairement à Al-Qaïda, n’avait pas l’intention d’étendre la « révolution islamique » en dehors du pays. Les « nouveaux talibans », en revanche, ne sont généralement plus « des étudiants en colère qui ne peuvent pas devenir oulémas, mais des chômeurs, des jeunes en quête d’aventure ou de vengeance, enragés par les innombrables dommages collatéraux de nos guerres indifférentes pour la démocratie[2] ». En tout cas, c’est en exploitant les solidarités claniques et familiales et les liens sociaux qu’ils ont été enrôlés : leur organisation militaire et politique était calquée sur ce plan, plutôt que sur le plan religieux.
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