LE SACERDOCE DU CHRIST ET LES AUTRES RELIGIONS
Last Updated Date : 25 novembre 2021
Published Date:17 juin 2020

Au cours des dernières décennies, plusieurs spécialistes chrétiens ont beaucoup écrit à propos de l’action salvatrice du Christ à l’égard des fidèles des autres religions, mais ils n’ont pas poussé leurs réflexions jusqu’au bout en y intégrant le sacerdoce du Christ. Quel enrichissement pourrait-il être apporté à la théologie des religions par la réflexion sur le sacerdoce du Christ ? Pour apporter une réponse à cette question, nous nous tournerons tout d’abord vers le concile Vatican II, nous nous concentrerons ensuite sur l’Épître aux Hébreux avant de conclure avec Paul et Jean.

Le concile Vatican II à propos du sacerdoce du Christ

Les personnes qui s’intéressent aux rapports entre le christianisme et les autres religions n’ont pas tenu compte du fait qu’une image utilisée par la Constitution du concile Vatican II sur la liturgie sacrée, la Constitution Sacrosanctum Concilium (SC), est très intéressante pour leur domaine. La Constitution cite un passage de l’encyclique de Pie XII sur le culte liturgique, Mediator Dei (1947)[1], remplaçant de manière significative « le Verbe de Dieu » par « Jésus Christ, le grand prêtre de la Nouvelle et Éternelle alliance ». Le langage adopté évoque la doctrine sur le sacerdoce du Christ telle qu’elle est développée par l’Épître aux Hébreux : « Le Grand Prêtre de la Nouvelle et Éternelle Alliance, le Christ Jésus, assumant la nature humaine, a introduit dans notre exil terrestre cet hymne qui se chante éternellement dans les demeures célestes. Il s’adjoint toute la communauté des hommes et se l’associe dans ce divin cantique de louange. » (SC 83)

Auparavant, la Constitution Sacrosanctum Concilium s’était limitée à la considération de l’Église et avait enseigné que le Christ ressuscité est « présent lorsque l’Église prie et chante les psaumes » (SC 7 ; les italiques sont de l’auteur). Désormais, le document parle d’un « divin cantique de louange », élevé en première personne par le Grand Prêtre qui réunit toute l’humanité dans le chant de cette hymne céleste qu’il a apportée sur la terre. Que nous en ayons conscience ou non, tous les êtres humains, indépendamment de leur appartenance religieuse, sont unis au Grand Prêtre incarné dans l’acte sacerdotal de louange à Dieu.

Ce n’est que dans la Constitution Sacrosanctum Concilium que le concile Vatican II relie tous les êtres humains au Christ, présenté de manière explicite dans son rôle universel, « sacerdotal », en tant qu’il adresse une louange à Dieu le Père. Sur quelles bases la Constitution conciliaire se fonde-t-elle pour présenter le Christ, Grand Prêtre, comme guide de cette hymne universelle de louange ? Nous trouvons une source immédiate dans le passage que la Constitution reprend de l’encyclique Mediator Dei, qui à son tour citait les Commentaires des Psaumes de saint Augustin : « Ainsi Notre Seigneur Jésus-Christ, unique Sauveur de son corps mystique, prie pour nous, prie en nous, et reçoit nos prières. Il prie pour nous comme notre prêtre, il prie en nous comme notre chef, il reçoit nos prières comme notre Dieu. Reconnaissons donc, et que nous parlons en lui, et qu’il parle en nous[2]. » Saint-Augustin invoquait ici le sacerdoce du Seigneur Jésus-Christ, cependant, il entend les psaumes non comme la voix de l’humanité tout entière, mais comme celle de l’Église, c’est-à-dire de la tête et des membres qui composent le totus Christus. La Constitution Sacrosanctum Concilium aurait pu remonter au-delà de Pie XII et de saint Augustin, en trouvant des témoins encore plus anciens : par exemple, Clément d’Alexandrie († vers 215).

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