Le récit de la femme adultère dans le quatrième Évangile canonique[1] ne faisait très probablement pas partie des traditions des communautés johanniques à l’origine. En effet, si ce récit est traduit de la Vulgate, commenté par Ambroise, Augustin et Jérôme, et contenu dans un important manuscrit de la tradition occidentale (Codex Bezae Cantabrigiensis), il ne figure pas dans les anciens manuscrits du quatrième Évangile canonique, dans la version syriaque de la Peshitta et la version copte bohairique. Certains Pères de l’Église (Origène, Cyprien, Chrysostome) ne font pas référence à ce passage. De plus, le style du grec n’est pas celui qui caractérise l’Évangile selon Jean. Une lecture contextuelle peut suggérer les raisons pour lesquelles le récit de la femme adultère occupe sa place actuelle dans le quatrième Évangile canonique.
Les mots du récit
Le récit commence par des informations sur le temps et l’espace : c’est l’aube, et Jésus se rend au temple. Tout le monde vient à lui pour écouter la parole de Dieu. Alors que Jésus enseigne, les scribes et les pharisiens lui amènent une femme prise en flagrant délit d’adultère, et la placent au milieu. Ils s’adressent à Jésus en tant l’appelant « maître » et lui disent que l’adultère est « évident » : la femme a été prise sur le fait. Les scribes et les pharisiens rappellent alors à Jésus les prescriptions de la Loi concernant des cas comme celui-ci[2], et lui demandent un jugement sur la question. En fait, ils posent cette question à Jésus pour le mettre à l’épreuve et l’accuser.
Puis Jésus, se penchant, « faisait des signes avec son doigt » sur le sol. L’attitude de Jésus est surprenante[3]. Veut-il détourner l’attention indignée des passants de la femme et l’attirer à lui ? Qu’est-ce que Jésus écrit ? Est-ce quelque chose que les spectateurs peuvent lire ? Par exemple, que la loi de Moïse condamne les deux personnes impliquées dans l’acte d’adultère, et pas seulement la femme[4] ? Il n’y a aucune référence dans ce récit à l’homme qui était avec la femme. Jésus écrit-il les péchés des personnes présentes, comme le disent certains manuscrits qui précisent le sens du verbe katagraphō (« faire une liste ») utilisé dans le texte ? Pour saint Ambroise et saint Augustin, Jésus écrit le texte de Jérémie 17,13 : « Espérance d’Israël, Seigneur, ceux qui t’abandonnent resteront dans la confusion ; ceux qui se détournent de toi seront inscrits dans la poussière, parce qu’ils ont abandonné le Seigneur, la source d’eau vive[5] ». Johannes Beutler voit dans le geste de Jésus écrivant sur le sol un contraste avec le Décalogue écrit sur la pierre : « La Loi de Moïse ne peut pas être utilisée comme un instrument rigide de mort. Elle doit être écrite dans le sable, elle doit être appliquée avec souplesse, en tenant compte de la situation et de la personne à qui elle est appliquée[6] ».
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