La conception du bonheur à l’époque moderne est très différente de celle du passé. Pour les anciens, y compris pour le christianisme, c’était la récompense de l’homme vertueux, étroitement lié au bien agir, fruit de l’effort et de l’éducation. De plus, il était associé à une dimension religieuse : c’était un don de Dieu. À l’époque moderne, le bonheur tend à devenir synonyme d’émotion, d’un « bien-être » subjectif, un sentiment qui peut être rendu possible non pas tant par une bonne conduite (qui est d’ailleurs assez souvent démentie), mais par un calcul, une technique ou de substances capables de susciter des sentiments de bien-être.
Dans cette conception différente de la vie, le bonheur s’aplatit sur le plan horizontal, empirique ; il se matérialise sous une forme plus précise mais aussi plus réductrice. Cela a des conséquences considérables, et pas seulement pour notre thème.
Le sentiment de bien-être accru et les possibilités prodigieuses offertes par la nouvelle science influencent la conception du bonheur. L’exaltation de l’activité humaine, rendue possible par la révolution scientifique et un siècle plus tard par la révolution industrielle, conduit au « désenchantement du monde », pour reprendre l’image suggestive de Marcel Gauchet. Dans cette nouvelle vision, les êtres et les médiations qui parlaient d’un « autre » monde ne sont plus présents ; parmi eux, il y avait sans doute des éléments fantaisistes et folkloriques (magiciens, sorcières, elfes, esprits) mais aussi des possibilités d’aider la faiblesse de l’homme (sacrements, sacramentaux, miracles, intercession des saints) qui se retrouve désormais abandonné à ses propres forces.
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François a condensé, en un simple message d’occasion, une réflexion forte et étendue sur la mission de l’Église dans le monde. La pandémie ayant rendu impossible sa présence lors de l’Assemblée générale annuelle des Œuvres Pontificales Missionnaires (PMS), il en a donc profité de l’occasion pour utiliser des mots qui ne peuvent pas être réduits à une rhétorique douce et commode. François propose, au contraire, une analyse très dure, dont le regard dépasse probablement ses destinataires directs, unie à un appel émouvant à l’Église pour qu’elle se laisse façonner par la rencontre avec le Christ et par la puissance vivifiante et contagieuse – donc missionnaire – de l’Esprit.
« Lorsque, dans la mission de l’Église, on ne saisit pas et on ne reconnaît pas l’œuvre actuelle et efficace du Saint-Esprit, cela signifie que même les paroles de la mission – voire les plus exactes ou les plus réfléchies – ne sont plus que des “discours de sagesse humaine”, utilisés pour se donner la gloire ou pour refouler et masquer ses déserts intérieurs ».
Le Message présente une Église qui choisit et préfère, sans rester immergée dans le sable mouvant des tensions endogènes et des équilibres stériles. François entend donc mettre l’Église dans un état de conversion, non pas en évoquant des « plans de mobilisation pastorale » ni des stratégies, mais en lui demandant à entrer dans « le corps à corps avec la vie concrète ». D’une manière simple, directe et franche, il dit ceci : soit on s’expose au souffle de l’Esprit, soit on meurt d’asphyxie. Le pire de ces asphyxies possibles est celle provoquée par l’étranglement des procédures. Le seul air respirable pour l’Église est celui de l’Esprit.
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