|
Revue de culture fondée en 1850
|
|
|
|
|
Récemment, en France, le Haut Conseil pour l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE), en vue de la révision annoncée de la Constitution, a proposé de remplacer, dans la devise nationale de la République, le mot fraternité par adelphité, mot qui dérive du grec et qui signifie « fraternité », mais privé de la connotation masculine propre au terme précédent. D’autres, pour éviter le néologisme, proposent simplement la solidarité. Et la controverse entre ceux qui sont en faveur et ceux qui s’opposent à l’une ou l’autre proposition n’a pas tardée.
Convaincus par le débat que suscite ce mot, nous voulons réfléchir à sa signification par le fait que dans un récent message à Madame la professeure Margaret Archer, présidente de l’Académie pontificale des Sciences sociales, le Pape François a précisément rappelé les trois principes directeurs de la Révolution française : liberté, égalité, fraternité. Ce sont trois idéaux, que les êtres humains ont longtemps désirés, proposés ensemble, même s’ils n’ont pas été réalisés simultanément. On pourrait dire qu’à la fin du dix-huitième siècle un processus de grande importance a commencé dans l’histoire de l’Occident. Dans ce processus de manifestation et de concrétisation des trois idéaux, la fraternité a sans doute été la moins développée et – souligne François – a fini par être annulée par le lexique politico-économique. Cependant, c’est précisément le principe qui devrait régir toutes les propositions de la Révolution.
On peut dire, reprenant une belle expression d’Henri Bergson, que liberté et égalité « sont deux sœurs qui se battent » et qu’à la fin elles ont besoin de quelqu’un pour faire des arrangements entre elles. C’est la fonction de la fraternité. Ces idéaux, longtemps désirés et réalisés après beaucoup de souffrances, ont en réalité produit de nouvelles formes d’inégalité et d’esclavage, dues à l’absence de la fonction régulatrice de la fraternité, longtemps négligée. Le problème crucial est que des formes authentiques de fraternité surgissent « d’en bas », de ceux qui se sentent frères et expriment cette relation dans une égalité et une liberté qui respecte les différences et les besoins de l’autre.
|
|
|
|
|
|